En tant que freelance, comment voyez-vous l’impact de la durabilité sur l’avenir du travail ?
La durabilité est un sujet qui devient incontournable. Il s’impose aujourd’hui à tous parce que ses enjeux deviennent urgents, au point que c’en est devenu un vrai sujet de conversation, notamment au sein de la sphère des freelances. Aujourd’hui, ils prennent d’eux-mêmes la parole sur ce sujet, dans le cadre personnel ou professionnel. Ils manifestent aussi de plus en plus l’envie travailler pour des entreprises dans lesquelles ils peuvent s’exprimer librement sur ces thématiques.
Du côté des entreprises, c’est un sujet qui interroge autant qu’il bouscule les lignes établies. Il n’est pas trop risqué de dire qu’elles vont devoir s’adapter, que ce soit pour revoir leur modèle ou juste leur communication. On voit d’ailleurs de plus en plus de création d’entreprises avec une mission d’impact au cœur de leur identité. Et ces nouvelles structures vont forcément demander à travailler uniquement avec des collaborateurs pour qui c’est aussi quelque chose d’important
La durabilité devient donc un sujet important parce que les entreprises et les freelances s’y intéressent de concert. Dans ce contexte, on peut facilement s’imaginer que la durabilité va devenir une norme demain. Je vois d’ailleurs un signal qui va dans ce sens : même les entreprises les « moins irréprochables » essaient de communiquer sur leur impact car elles comprennent que devenu indispensable. Pour le moment, je l’identifie seulement comme une couche de communication puisqu’il est évident que des modifications structurelles aussi importantes ne peuvent pas se faire en si peu de temps. Mais je vois que les chantiers sont lancés en interne, notamment le premier que je viens d’évoquer, qui est d’axer sa communication autour de ses avancées en durabilité. Pour les chantiers qui suivent, il s’agit plutôt de faire des changements en profondeur qui touchent au business model. De ce côté, c’est seulement en train d‘émerger mais il est clair que cela va vite devenir difficile de négliger cette partie-là.
Est-ce que les freelances sont sensibles aux engagements des entreprises en matière de durabilité ?
Oui, j’en suis convaincu. Bien-sûr, tous les freelances n’y sont pas sensibles, mais beaucoup préfèreront se tourner vers le client qui propose des vraies actions responsables quand ils auront le choix entre deux missions d’entreprises différentes. Et j’ai la conviction que cet exemple est valable même si le client affichant des engagements concrets proposera une rémunération moins intéressante.
Plus généralement, les freelances s’interrogent beaucoup aujourd’hui sur comment concilier leurs convictions avec leurs activités. C’est même pour cette raison que de plus en plus de freelances se positionnent sur l’impact : ils veulent répondre concrètement à ce besoin nouveau.
Et, comme je l’ai dit plus tôt, les entreprises sont aussi de plus en plus nombreuses à adopter des engagements. A cela s’ajoutent encore de nouveaux acteurs qui encouragent la croissance de cet écosystème de la durabilité. In fine, on se retrouve avec un marché grossissant dans lequel des freelances cherchent des missions compatibles avec leurs convictions et des entreprises cherchent des freelances pour les aider dans leur transition durable. Cela va dans le bon sens.
Comment les entreprises devront-elles s’adapter à ce nouvel enjeu ?
Plus que jamais, les entreprises doivent se montrer responsables dans leur cœur de métier : est-ce que leur activité est destructrice d’un point de vue environnemental, ou est-ce qu’elle a un impact positif ou encore, a minima, est-elle neutre sur le sujet ?
Cela va de soi mais il est bon de le rappeler : les entreprises doivent en premier lieu s’interroger sur leur impact avant de se demander comment elles communiquent sur le sujet. Cela passe par s’interroger sur ce que l’on vend à qui et avec quelle incidence sur la planète. Sans oublier de mesurer ses avancées afin de savoir comment rectifier le tir si jamais cela ne va pas dans le bon sens.
Bien-sûr, la communication demeure une couche importante et utile mais il faut garder à l’esprit que même une bonne communication ne sauvera pas une entreprise qui fera n’importe quoi à côté.
Comment les indépendants peuvent-ils encourager leurs clients à donner la priorité à la durabilité dans leurs pratiques de travail ?
Le rôle des indépendants peut avoir de la valeur dans un rapport de force. Si les entreprises n’arrivent plus à recruter car tous les indépendants leur disent que la durabilité est importante et qu’ils ne sont pas au niveau, ils devront bien se remettre en question.
Les freelances ont un pouvoir, celui de choisir à qui ils acceptent de donner leur temps. Faire ce premier tri dans leurs clients est donc important. Ensuite, ils doivent continuer à prendre la parole comme le font déjà de nombreux indépendant pour exprimer leur engagement et leur volonté de travailler avec des entreprises à impact. Cela ne pourra qu’encourager les entreprises qui hésitent encore à s’y mettre à leur tour.
Comment les indépendants peuvent-ils tirer parti des pratiques de travail durables pour se différencier sur un marché concurrentiel ?
Aujourd’hui, c’est un indéniable atout de dire que l’on travaille avec des entreprises sensibilisées aux enjeux de durabilité et que ce sont des sujets sur lesquels on est à l’aise. Cela me parait évident qu’une entreprise engagée travaille avec des freelances engagés, parce que l’on a besoin de connaitre l’écosystème, les codes et l’univers pour rendre un travail de qualité. Par exemple, si un client demande un article sur le changement climatique, ce ne sera pas l’affaire de faire quelques recherches mais plutôt d‘être déjà positionné dans ce domaine-là, de s’intéresser à titre personnel, de consommer du contenu régulièrement, et plus largement d’être engagé. Aussi, j’en reviens à ce que je disais pour commencer : c’est un sujet qui transcende tout car il englobe la sphère professionnelle comme personnelle.