Qu’est-ce qu’un Coordinateur Achats Responsables ?
« Le Coordinateur Achats Responsables est le garant de l’application des concepts du développement durable dans la politique achats d’une entreprise. Mon rôle est de garantir que nos pratiques d’achats respectent des critères environnementaux, sociaux et éthiques rigoureux. Dans cette perspective, je travaille en étroite collaboration avec les acheteurs, les prescripteurs et les fournisseurs de GRDF, afin d’identifier des leviers d’action sur tout le cycle de vie des produits et services dont nous avons besoin. »
Pourquoi sensibiliser et former l’ensemble des acheteurs aux Achats Responsables ?
« Selon l’ADEME, les achats d’une entreprise représentent en moyenne 50 à 60% de son chiffre d’affaires. S’intéresser à la fonction Achats, c’est donc cibler des montants considérables qui génèrent des impacts et par conséquent, des leviers d’action tout aussi importants. Par exemple, les acheteurs plus responsables assurent une meilleure performance économique grâce à la prise en compte du coût du cycle de vie et à une plus grande résilience de la chaîne de valeur face aux risques d’approvisionnement.
De nombreux bénéfices qui apportent une réponse positive et proactive face au renforcement du cadre réglementaire (CSRD et CS3D notamment) et aux attentes des différentes parties prenantes (clients, actionnaires, société civile, etc.). En fin de compte, des achats plus responsables contribuent à l’amélioration de l’image et de la compétitivité des entreprises.
Les acheteurs jouent ainsi un rôle clé et détiennent une immense responsabilité dans la performance économique, environnementale et sociétale de leur organisation. Cependant, acheter responsable n’est pas inné. La sensibilisation et la formation sont ainsi essentielles pour que chaque contributeur des achats endosse et maximise son rôle d’acteur de la durabilité. »
Quels outils et bonnes pratiques avez-vous utilisés pour le faire ?
« GRDF a lancé une première vague de formations aux Achats Responsables en 2020. Cependant, ces formations n’ont pas produit les résultats attendus car trop descendantes, théoriques et manquaient d’engagement. Deux années plus tard, nous observions toujours une maturité hétérogène des acheteurs, qui rencontraient souvent des difficultés à intégrer de manière impactante et efficace les préceptes de la RSE. Parallèlement, l’obtention du Label Relations Fournisseurs Achats Responsables (RFAR) en 2021 nous a encouragés à renforcer notre politique d’achats responsables. Nous avons donc décidé de lancer une seconde vague de formation aux Achats Responsables, cette fois de manière plus opérationnelle et interactive.
Dans ce cadre, j’ai mené un exercice d’écoute des acheteurs pour identifier au mieux leurs besoins et attentes. Grâce à ces échanges, j’ai défini la ligne directrice de ce qui est devenu la Fresque des Achats Responsables : sensibiliser les participants sur le rôle crucial des achats dans la performance financière et extra-financière des organisations, et leur fournir une boîte à outils claire et complète afin qu’ils actionnent les bons leviers, aux bons moments, avec les bons acteurs.
Pour ce faire, je me suis beaucoup inspiré de la norme ISO 20400 sur les Achats Responsables, notamment parce que le Label RFAR s’appuie sur ces lignes directrices mais surtout parce qu’elle fait office de référence. Nous avons adopté une approche itérative : les premières sessions ont été riches en couleurs et en apprentissages. Elles m’ont permis d’aligner rapidement le déroulement de l’atelier avec les attentes des participants. Je les remercie encore pour leurs retours précieux.
En plus, j’ai créé et mis à disposition des participants un livrable de cet atelier, reprenant toutes les thématiques abordées avec des définitions, bonnes pratiques, exemples concrets et surtout tous les liens utiles afin de faciliter le passage de la théorie à la pratique.
Plus d’un an après sa création, la fresque s’est beaucoup enrichie au gré des itérations et grâce aux retours des plus de 200 personnes formées à ce jour. Cette fresque a d’ailleurs reçu de très bons retours de la part de la profession avec deux prix obtenus lors des Trophées Achats 2023 du média Décision Achats. GRDF a décidé de l’intégrer parmi les outils de formation stratégiques pour répondre aux attentes de plus en plus fortes sur le sujet, exprimées notamment par notre nouveau projet d’entreprise, « Mission Décarbonation ».
Pour accompagner ce déploiement, je développe un réseau d’animateurs qui dispensent cette formation auprès des différents acteurs de l’écosystème des achats de GRDF (acheteurs, prescripteurs, utilisateurs, référents RSE, etc.). »
Quel impact ? Quels changements de pratiques cela a-t-il permis ?
« La Fresque des Achats Responsables a permis une meilleure compréhension des enjeux de durabilité parmi les acheteurs et prescripteurs formés, augmentant ainsi leur capacité à intégrer ces notions dans leurs décisions quotidiennes. Par exemple, l’ensemble de nos achats intègre désormais des critères RSE à hauteur de 10 % de la pondération totale de la notation des offres. Nous avons également observé une augmentation de nos achats inclusifs (3,5 millions d’euros auprès du secteur du handicap en 2023), une réduction des GES et des risques liés à la chaîne d’approvisionnement, et une amélioration de notre image auprès de nos parties prenantes. »
Quels conseils donneriez-vous à une entreprise qui souhaiterait se lancer dans la démarche ?
« Je vais probablement enfoncer des portes ouvertes mais mon premier conseil, qui est plus un prérequis, est d’intégrer formellement la RSE dans la gouvernance et les engagements de l’entreprise. Sans engagements ni conviction de la part de la ligne managériale, les contributeurs des achats ne seront pas encouragés à changer leurs pratiques, pire encore, cela pourrait alimenter une certaine frustration en cas de refus répétés de leurs propositions.
Mon second conseil serait de privilégier des formations sur les Achats Responsables avec des binômes acheteurs/prescripteurs pour que chacun identifie les leviers à actionner et les acteurs à solliciter, et ce, à chaque étape de la vie d’un achat. Même avec la meilleure volonté du monde, un acheteur ne pourra pas optimiser ses actions sans une compréhension et une contribution forte de son binôme prescripteur.
Ensuite, l’acculturation des acteurs aux achats responsables doit, selon moi, s’inscrire dans un parcours de formation transverse et durable. Cela commence par des concepts de sensibilisation de base (fresque du climat, fresque carbone ou atelier 2tonnes), puis sur le métier (fresque achats responsables) et enfin sur des sujets spécifiques, adaptés à leur famille d’achats, idéalement avec la contribution des principales parties prenantes de cet écosystème (journée d’acculturation à l’économie circulaire, l’inclusion, les coûts du cycle de vie, etc.).
Enfin, au-delà de la durée d’apprentissage pour atteindre une pratique “mature”, l’application opérationnelle des achats responsables requiert du temps ! Veille, questionnaires, audits, retours d’expérience, échanges prospects/fournisseurs, notation des offres, etc. : autant d’actions de fond qui doivent s’intégrer dans le quotidien et donc dans le plan de charge des acheteurs et des prescripteurs.
Selon moi, il faut investir du temps dans le travail en profondeur de ces stratégies d’Achats Responsables, un temps qui sera, à terme, compensé par des innovations ou d’autres leviers riches en performances matérielles et immatérielles. »
